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Eliette Dupouy et Marnie seront à l'honneur des journées du patrimoine

Par Corentin Barsacq

Crédit photo: Michel Godineau
Crédit photo: Michel Godineau

Disparues au cours de l’année, la poètesse Eliette Dupouy et l'artiste plasticienne Marnie Martin recevront un hommage à hauteur de ce qu’elles ont apporté dans leurs domaines respectifs. Entre Belin-Béliet et Salles, les deux femmes ont fait partie de l’histoire. Portrait croisé de ces deux artistes aux racines proches. 

 

Dans l’atelier de l’artiste Marnie, le désordre était symbole de passion. Chez Eliette, les cahiers qui s’entassaient et dans lesquels elle posait son encre l’étaient tout autant. Marnie est né à Salles en 1943. À l’époque, la jeune Nicole Lapenue hérite de l’âme artistique de son grand-père André Estibal, peintre décorateur. Dix ans auparavant, Eliette Dubedat voyait le jour à Béliet. Destinée à une vie gasconne, à entretenir le bétail, elle développe une curiosité singulière autour des métiers d’antan. En soi, elle aussi était une héritière. Une héritière des traditions qui avait fait la promesse aux ainés de faire perdurer leur histoire. Dans la cité salloise, Nicole Lapenue deviendra plus tard Nicole Martin, mariée à Serge, enseignant à Salles. Tous les deux épouseront l’éducation. À seulement 23 ans, Nicole Martin est nommée directrice de l’école de Salles tandis que Serge l’assiste. Surnommée la « fille du laitier » en référence au métier de son père Éloi Dubedat, Eliette va quant à elle sceller son union avec Alfred Dupouy, personnage bien connu du pays et employé de fonderie. 


Dans leurs domaines respectifs, une forme de poésie 


Diplômée d’un certificat d’études, Eliette aura toujours gardé une belle prose. Dans sa maison, des objets entassés et une décoration rustique, le cœur des Landes de Gascogne. Chaque objet témoigne d’un souvenir auquel la vieille dame greffe une histoire. Elle qui rêvait d’être infirmière et qui finalement s’occupera des champs, aura la tâche de garder les vaches et de porter le lait aux familles les plus modestes. C’est à cette époque qu’elle deviendra la voix de l’histoire, celle « soun païs. » Les évènements marquants que le territoire aura traversés, à l’instar du grand feu de 1949, deviennent matière à aligner les rimes entre elles et écrire des poèmes singuliers.

 

Sur ses cahiers, une écriture calligraphique singulière, exceptionnelle, qui glisse entre les lignes. Des poèmes, des dessins, des témoignages, ce seront là les premières bribes de ses impérissables souvenirs. De son côté, Nicole Martin aura choisi les arts plastiques pour transmettre. Tant aux enfants lors des colonies de vacances organisés avec son mari Serge, qu’à son entourage et ses amis à qui elle fera découvrir ses talents.  Psychologue scolaire jusqu’à sa retraite en 1998, elle s’est ensuite consacrée pleinement à sa passion : « Elle était libre de créer sans limites. Elle signait ses œuvres sous le pseudonyme de Marnie » se rappelle Serge. 

Malade, Marnie avait peint ce dernier autoportrait à destination de la clinique dans laquelle elle était hospitalisée.
Malade, Marnie avait peint ce dernier autoportrait à destination de la clinique dans laquelle elle était hospitalisée.

Ses voyages en Espagne l’inspirent tout comme les paysages de la région. Ses compositions racontent une histoire, partent d’une thématique pour ensuite y faire découler un message. Cette sensibilité pour l’art sera récompensée par plusieurs expositions à Bordeaux, en Espagne et dans la France entière. Atteint de la maladie de Parkinson dès 2015, l’artiste ne sait pas laissée abattre. Accompagnant Serge dans les parutions de ses ouvrages traitant de l’histoire, c’est à ses côtés qu’elle a terminé son œuvre. Quelques jours avant son départ, elle finissait un pochoir sur la porte du garage avec l’aide de son mari : « Ce n’est pas mal ce qu’on a réussi à faire tous les deux » disait-elle en contemplant leur réalisation. 

 

Eliette est elle aussi partie en mars, laissant son Belin-Béliet natal sans voix. Sa voix douce chantant « Moun Païs » aura marqué plus d’une génération. Samedi 19 septembre, la municipalité et les associations locales lui rendront hommage par la lecture de ses poèmes en partenariat, par la voix de Myriam Both de la bibliothèque Aliénor. Des photos et vidéos seront projetées dans le vestibule de l'église Saint-Pierre de Mons. Le rassemblement aura lieu à 17h. Un moment fort qui se déroulera sur l’airial de Mons, théâtre de ce week-end dédié au patrimoine belinétois. Des visites de l’église du Mons seront également organisées par l’association présidée par Alain de Sigoyer. On retrouvera également le visage d’Eliette lors de l’exposition « C’est dans le journal » des Amis du Musée Lapios qui ont tenu à rendre hommage eux aussi à la poétesse mais aussi Jean-Louis Brouste. 

 

Ayant fait la promesse de mettre en lumière l’œuvre de son épouse, Serge Martin ouvrira l’atelier de Marnie aux visiteurs. Une immersion au cœur d’un univers singulier le samedi 19 septembre et tout au long de la journée : « Les visiteurs pourront découvrir les techniques utilisées par Marnie dans ses compositions ainsi que les différentes histoires qu’elle racontait à travers plusieurs éléments de ses œuvres » explique Serge Martin. Aux côtés de sa fille Sophie qui exerce en tant qu’historienne d’art, Serge fignole les dernières préparations. D’autres œuvres devraient être exposées à la médiathèque de Salles le mois prochain. Une manière de terminer la boucle comme il se doit. Marnie jouait avec les sens dans un désordre finalement bien organisée à l’image de son atelier. Pastels à l’huiles, collages-assemblages ou encore acryliques, son style pluriel a su séduire. Eliette elle, jouait avec les mots, avec une naïveté touchante, un regard profond. Chacun y trouvait son compte. Le Val de l’Eyre a perdu deux grandes femmes en 2020. Aux prochaines générations de faire perdurer cet héritage. 


Le programme des Journées Européennes du Patrimoine 2020