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Inondations: « Du jamais vu » prévu dans la vallée de la Leyre

Par Corentin Barsacq

Crédit photo: Laurent Degrave.
Crédit photo: Laurent Degrave.

La Gironde vient d’être placée en vigilance rouge pour pluies et inondations. Pour Laurent Degrave, technicien rivière au Parc naturel régional des Landes de Gascogne, le risque est bien réel dans le Val de l’Eyre. 

« En 20 ans, c’est du jamais vu. » Joint par téléphone ce matin, Laurent Degrave ne cache pas son inquiétude face à un phénomène inédit. Hier soir, sur ses réseaux sociaux, cet expert de la Leyre alertait déjà sur les quantités de pluies annoncées aujourd’hui et tout au long de la nuit prochaine : « C’est de récurrence centennale selon météo France pour un total de 160 mm. Du jamais vu sur la Leyre. » 

Depuis ce matin et jusqu’à lundi, la Gironde est donc en vigilance rouge à la vue d’une nouvelle dégradation pluvio-orageuse qui frappera le Sud-Ouest. Si rien n’est alarmant pour le moment, les précipitations vont rapidement s’intensifier et perdurer au cours des prochaines 48 heures avec des cumuls de précipitations "exceptionnels." Problème : Dans la vallée de l’Eyre, les nappes phréatiques sont pour la plupart déjà saturées. Une composante inquiétante à prendre en compte alors qu’on attend désormais des cumuls allant entre 150 et 200 mm. 


« Des précipitions historiques »


En veille sur ses réseaux sociaux depuis l’annonce des intempéries, Laurent Degrave parle avec expertise d’un phénomène qu’il redoute : « Cela va engendrer des débordements de cours d'eau mais aussi des remontées de nappes étant donné la saturation actuelle de la nappe phréatique. » Joint par téléphone, il étaye son propos en évoquant son expérience : « Il s’agit d’un évènement centennal. On sait que cela peut arriver mais on ne sait jamais quand. Cette centennale, on l’attend. Aujourd’hui, on est sur le plus haut des nappes. Elles arrivent à saturation dans toutes les zones de plateaux. Un schéma similaire à la crue de juin 2013.» 


« Quelque chose d’inédit, d’étonnant et perturbant » 


Pour le technicien, ce qui attend le Val de l’Eyre cette nuit est inédit et impactera forcément certains quartiers : « De nombreux terrains pourraient être sous l’eau. Les habitations entourées de fossés sont sujettes aux inondations. Ce qui est annoncé, ce sont des quantités multipliées par deux. Le volume et la réactivité de nos terrains vont être problématiques. » 

 

Il prévient notamment des risques que peuvent entrainer les intempéries : « Certaines routes pourraient être coupées, des caves inondées et les réseaux d’assainissements perturbés. Le long de la Leyre, il faudra veiller aux ouvrages comme les ponts qui sont sujets à l’érosion. Les stations d’épurations situées en bordure de la Leyre comme à Belin-Béliet ou Salles vont également être impactées. » 

Plus inquiétant encore, l’observation de Laurent Degrave sur un quartier de Béliet : « Sur le secteur du Moura, on constate que des argiles se gonflent et se dégonflent dans un lotissement. Un évènement comme celui-ci m’inquiète car cela peut entrainer des glissements de terrain. » 

 

Si les prévisions sont inquiétantes, il refuse néanmoins de faire du « catastrophisme » et veut croire en la force naturelle de la Leyre due à la résilience : « On a une rivière qui est sauvage et protégée. La Leyre a une large vallée qui n’a jamais été contrainte. Elle permet d’absorber et d’affronter les crues et les sécheresses. » 

 

Comprenons donc que les intempéries prévues représentent principalement un risque matériel. Pour limiter les dégâts, quelques conseils peuvent être appliqués dès aujourd’hui : « Même si demain sonne le déconfinement, il serait bien d’éviter les déplacements. Pour les terrains exposés aux inondations, l’idéal serait de déplacer les véhicules sur des zones en hauteur où à l’extérieur des propriétés pour pouvoir envisager de se déplacer demain en cas d’obligation » observe Laurent Degrave.